«Nous craignons pour sa vie»
Les dernières images de Hossam Abou Safiya montrent un homme déterminé, vêtu de sa blouse blanche, au milieu des ruines de l’hôpital qu’il dirigeait, face à des chars israéliens. Suspecté d’être un «terroriste» du Hamas, il a ensuite été interpellé par l’armée israélienne aux côtés d’environ 240 personnes. Selon des témoignages recueillis par l’ONG Euro-Med Monitor, Hossam Abu Safiya a été sévèrement battu à coups de matraque et de bâton par les forces israéliennes, qui l’ont forcé à se déshabiller. Il a ensuite été emmené dans un lieu tenu secret avant d’être transféré au camp militaire de Sde Teiman, dans le désert du Néguev, un centre tristement célèbre pour les mauvais traitements infligés aux détenus. Il serait soumis à de «graves tortures», entraînant une détérioration significative de son état de santé. «Nous craignons pour sa vie», a déploré son fils, Idris.
Figure majeure du système de santé palestinien, ce pédiatre de formation était l’un des derniers témoins de la tragédie qui frappe le nord de l’enclave, transformée par l’armée israélienne en un paysage apocalyptique. A travers des vidéos, il implorait la communauté internationale de faire cesser les attaques contre l’hôpital Kamal-Adwan, le dernier centre de santé encore opérationnel dans la partie septentrionale du territoire.
Devoir moral
Hossam Abou Safiya a payé un lourd tribut au conflit israélo-palestinien. Né au sein d’une famille réfugiée, expulsée de la ville de Hamama lors de la «Nakba» («catastrophe» en arabe, qui désigne le déplacement forcé de 700 000 Palestiniens à la création de l’Etat d’Israël en 1948), le médecin avait déjà été arrêté en octobre, avant d’être relâché. Peu après sa libération, il a appris la mort de son fils Ibrahim, tué lors d’un bombardement. Malgré cette perte déchirante, il a continué à travailler, refusant de quitter Gaza y compris lorsqu’il a été grièvement blessé, en novembre. Son poste relevait selon lui d’un devoir moral et d’un acte de résistance face à la destruction systématique des infrastructures médicales palestiniennes. «Il s’accrochait à Kamal-Adwan. Nous sommes restés jusqu’à ce que les Israéliens nous expulsent», a témoigné son épouse.
Malgré la pression constante et le manque de ressources, Hossam Abou Safiya a été salué pour son dévouement à ses patients, même dans des conditions de plus en plus extrêmes. Depuis le début de la guerre, le nord de Gaza est sous siège strict, avec une pénurie croissante d’eau, de nourriture, de carburant et de médicaments. La fermeture de l’hôpital Kamal-Adwan a détruit le système de santé local, et l’ONU qualifie désormais les hôpitaux de «pièges mortels».